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pour la langue internationale

Cette méthode éclectique permettrait même de remédier aux équivoque des langues vivantes, et de distinguer les idées trop souvent confondues sous un même mot, en leur assignant des radicaux différents empruntés à des langues diverses[1]. Il est clair qu’un vocabulaire ainsi formé possédera la plus grande internationalité possible, et sera le plus facile à apprendre pour chaque peuple, qui y connaîtra d’avance la moitié au moins des radicaux.

Formation des mots dérivés et composés.

Nous avons constamment parlé de radicaux : c’est qu’en effet, pour qu’une langue soit simple et aisée à apprendre, il faut autant que possible réduire au minimum le nombre des mots primitifs, dont le sens conventionnel est à retenir de mémoire[2]. Par suite, on devra pouvoir former le plus grand nombre possible de mots dérivés et composés suivants des règles absolument générales et uniformes.

Par exemple, le nom de celui qui pratique un art, une science ou un métier se formera au moyen d’un suffixe invariable (-ist, je suppose), au lieu que dans nos langues ces sortes de noms ont une foule de suffixes différents (dentiste, bottier, pharmacien, marin, commerçant, professeur, etc.). Il suffit d’une trentaine d’affixes empruntés, eux aussi, aux différentes langues vivantes ou mortes, pour traduire à peu près toutes les relations de ce genre, et l’on conçoit quelle clarté donne à la langue l’uniformité de sens de chacun d’eux. Pour la formation des mots composés, la L. I. devra présenter les mêmes facilités que le grec et l’allemand, par exemple, et procéder suivant les mêmes règles. En résumé, la L. I. aura toute faculté de former, au moyen des racines empruntées aux diverses langues, tous les mots dérivés et composés dont on aura besoin, et cela d’une manière régulière et automatique, sans qu’on soit jamais arrêté par aucune exception, et sans qu’on se

  1. Exemples : adresse, air, bois, botte, cours, droit, état, fort, génie, glace, intérêt, lettre, maître, mine, note, ordre, palais, propre, ressort, sac, sens, son, timbre, vol, voile, volume, et presque toutes les prépositions et conjonctions, sans parler des innombrables équivoques des mots que, en, si, etc.
  2. Ainsi il est évident que les mots qui signifieront paix et apaisement devront avoir le même radical. De même droit, rectitude, rectifier ; etc.