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LE SOPHA

tère ne me le permit point ; je suis franche, naturelle, vous me plaisez, et me voilà. Vous n’en pensez pas plus mal de moi, peut-être ?

— « Qui ? Moi ? répondit-il, en haussant les épaules ; voilà une belle idée ! J’en penserais mille fois mieux, s’il m’était possible !

— « Au vrai, vous êtes charmant, reprit-elle ; mais, dites-moi donc, y a-t-il longtemps que vous êtes ici ?

— « J’arrivais, repartit-il, et j’en rougis, j’en suis confondu : mais vous avez pensé être ici la première.

— « Cela aurait vraiment été joli, dit-elle, et je n’aurais pas manqué de vous en savoir gré ! »

« Pendant qu’elle parlait, Mazulhim, qui la connaissait trop pour la respecter seulement un peu, prenait avec elle les plus grandes libertés. Loin qu’elle m’en parût plus émue que lui, elle promena ses yeux dans le cabinet avec distraction, puis, les ramenant sur sa montre :

— « Mais quelle folie donc, Mazulhim ! lui. dit-elle ; est-ce que nous serons seuls tout le jour ?

— « Voilà une assez bonne question ! répondit-il. Sans doute nous serons seuls !

— « Mais vraiment, reprit-elle, je n’avais pas compté là-dessus ; laissez donc ! ajouta-t-elle sans aucun désir qu’il finît, ni qu’il continuât (aussi ne s’en embarrassa-t-il pas plus