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LE SOPHA

pas davantage, car je sens que sur cet article je n’ai rien de plus à vous répondre.

— « Ah ! je vous entends, répliqua-t-il ; cependant je ne reconnais point Mazulhim au portrait que vous m’en faites.

— « Mais, reprit-elle, il me semble que je ne vous dis rien de lui.

— « Ah ! pardonnez-moi ! repartit-il : on sent aisément ce qu’on reproche à un homme quand on dit de lui qu’il a le cœur épuisé ; c’est une expression modeste et mesurée, mais on l’entend. Je suis surpris pourtant que vous ayez eu à vous plaindre de lui.

— « Je ne m’en plains pas, Nassès, répondit-elle ; mais, puisque vous voulez savoir ce que j’en pense, je vous dirai qu’il est vrai que j’en ai été surprise.

— « Ah ! ah ! dit-il, quoi ! quoi ! vous l’avez trouvé ?…

— « Cela est étonnant ! reprit-elle, à ce que je crois du moins.

— « Oh ! je m’en rapporterais bien à vous.

— « Sans doute ! répondit-elle ironiquement, l’expérience m’a donné là-dessus de si grandes lumières !

— « Expérience ou non, répliqua-t-il, on sait ce que doit être un amant quand on veut bien ne lui laisser plus rien à désirer ; il y a là-dessus une tradition établie. Mais j’avoue encore une fois que vous me surprenez, car Mazulhim…