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Page:Crébillon (Fils) - Le Sopha.djvu/283

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LE SOPHA

avait tour à tour honte de sa facilité et de ses répugnances. La crainte de déplaire à Phéléas, l’émotion que lui causaient ses transports, et l’épuisement où un combat aussi long l’avait jetée, la forcèrent enfin à se rendre. Livrée elle-même à tous les désirs qu’elle inspirait, ne supportant qu’impatiemment des plaisirs qui l’irritaient sans la satisfaire, elle chercha la volupté qu’ils lui indiquaient et ne lui donnaient point.

« En ce moment, outré du spectacle qui s’offrait à mes yeux, et commençant à craindre à de certaines idées de Phéléas qui me prouvaient son peu d’expérience, qu’il ne chassât mon âme d’un lieu où, malgré les chagrins qu’on lui donnait, elle se plaisait à demeurer, je voulus sortir pour quelques instants du sopha de Zéïnis, et éluder les décrets de Brahma. Ce fut en vain ; cette même puissance qui m’y avait exilé, s’opposa à mes efforts et me contraignit d’attendre, dans le désespoir, la décision de ma destinée.

« Phéléas… Ô souvenir affreux ! moment cruel, dont l’idée ne s’effacera jamais de mon âme ! Phéléas, enivré d’amour et maître, par les tendres complaisances de Zéïnis, de tous les charmes que j’adorais, se prépara à achever son bonheur. Zéïnis se prêta voluptueusement aux transports de Phéléas, et si les nouveaux obstacles qui s’opposaient encore à sa félicité la retardèrent, ils ne la diminuèrent pas. Les