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Page:Crébillon (Fils) - Le Sopha.djvu/52

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LE SOPHA

Abdalathif, ouvrant pesamment les yeux, ne lui eût demandé, d’un ton brusque, l’heure qu’il était. Il se leva sans attendre sa réponse.

— « Adieu ! lui dit-il, en la caressant brutalement ; je vous ferai dire demain si je puis souper ici. »

« À ces mots il voulut sortir. Quelque envie qu’eût Amine qu’il la laissât libre, elle crut devoir le retenir, quoiqu’elle poussât la fausseté jusqu’à pleurer de son départ ; il fut inexorable, et se débarrassa des bras d’Amine, en lui disant qu’il voulait bien qu’elle l’aimât, mais qu’il ne prétendait pas être gêné.

« D’abord qu’il fut sorti, elle sonna, en l’honorant à demi-bas de toutes les épithètes qu’il méritait. Pendant qu’on la déshabillait, sa mère vint lui parler bas. La nouvelle qu’elle donnait à Amine lui fit hâter ses esclaves ; enfin elle ordonna qu’on la laissât seule. Peu de moments après que sa mère et ses esclaves se furent retirés, la première rentra. Elle menait un nègre mal fait, horrible à voir, et qu’Amine n’eut pourtant pas plutôt aperçu, qu’elle vint l’embrasser avec emportement.

— Amanzéi, dit le Sultan, si vous ôtiez ce nègre-là de votre histoire, je pense qu’elle n’en serait pas plus mauvaise.

— Je ne vois pas ce qu’il y gâte, Sire, répondit Amanzéi.

— Je m’en vais vous le dire, moi, répliqua