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Page:Crébillon - Théâtre complet, éd. Vitu, 1923.djvu/262

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Elle n'en est pas moins sincère pour mon roi.

Pharasmane

Fils indigne du jour, pour me le faire croire
Fais que de tes projets je perde la mémoire.
Grands dieux ! Qui connaissez ma haine et mes desseins,
Ai-je pu mettre au jour un ami des romains ?

Rhadamisthe

Ces reproches honteux dont en vain l'on m'accable
Ne rendront pas, Seigneur, votre fils plus coupable.
Que sert de m'outrager avec indignité ?
Donnez-moi le trépas si je l'ai mérité :
Mais ne vous flattez point que tremblant pour ma vie
Jusqu'à la demander la crainte m'humilie.
Qui ne cherche en effet qu'à me faire périr,
En faveur d'un rival pourrait-il s'attendrir ?
Je sais que près de vous, injuste ou légitime,
Le plus léger soupçon tint toujours lieu de crime ;
Que c'est être proscrit que d'être soupçonné ;
Que votre cœur enfin n'a jamais pardonné.
De vos transports jaloux qui pourrait me défendre,
Vous qui m'avez toujours condamné sans m'entendre ?

Pharasmane

Pour te justifier, eh ! Que me diras-tu ?

Rhadamisthe

Tout ce qu'a dû pour moi vous dire ma vertu ;
Que ce fils si suspect, pour trahir sa patrie,
Ne vous fût pas venu chercher dans l'Ibérie.

Pharasmane

D'où vient donc aujourd'hui ce secret entretien,
S'il est vrai qu'en ces lieux tu ne médites rien ?
Quand je voue aux romains une haine immortelle,
Voir leur ambassadeur, est-ce m'être fidèle ?
Est-ce pour le punir de m'avoir outragé,
Qu'à lui parler ici mon fils s'est engagé ?
Car il n'a point dû voir l'ennemi qui m'offense,
Que pour venger ma gloire, ou trahir ma vengeance.
Un de ces deux motifs a dû seul le guider ;
Et c'est sur l'un des deux que je dois décider.
Éclaircis-moi ce point, je suis prêt à t'entendre :
Parle.

Rhadamisthe

Je n'ai plus rien, Seigneur, à vous apprendre.
Ce n'est pas un secret qu'on puisse révéler :
Un intérêt sacré me défend de parler.


Scène IV.

Pharasmane, Arsame, Mitrane, Hydaspe, Gardes.
Hydaspe