II}}
Malgré les soins divers dont vous étiez la proie,
Je lis dans vos regards une secrète joie,
Qui dissipe ma crainte et flatte mon espoir ;
César l’augmente encor dès qu’il veut vous revoir.
Ah ! Cicéron, souffrez que je vous concilie,
Pour triompher d’Antoine, et pour braver Fulvie,
Accordez votre fille aux soins officieux
D’un ami qui voudrait pouvoir l’unir aux dieux ;
Renoncez à l’orgueil de ces vertus austères,
Qu’en des temps moins cruels se prescrivaient nos pères.
Ce n’est qu’en se pliant à la nécessité,
Que l’on peut des tyrans tromper l’autorité ;
Un torrent n’a jamais causé plus de ravage,
Que lorsqu’à son courant on ferme le passage ;
Laissez-le s’écouler, et nous donnez la paix,
Couronnez par ce don tous vos autres bienfaits.
César vous aurait-il chargé de la conclure,
Rebuté d’outrager les dieux et la nature ?
Moins pressé de la soif de grossir ses trésors,
Vous aurait-il promis de respecter les morts ?
De ne point dépouiller leurs enfants et leurs femmes,
Des biens que ce cruel prodigue à des infâmes ?
Ignorez-vous encor que des édits nouveaux,
Ordonnent de fouiller jusque dans les tombeaux ?
Que son avidité, par des lois inhumaines,
Impose des tributs jusqu’aux dames romaines ?
Vous fait-il espérer que de notre union,
L’instant sera la fin de la proscription ?
C’est pour vous que d’hier César l’a suspendue.
Eh bien, sur ce tableau daignez jeter la vue,
Pour mieux me distinguer ; c’est mon funeste nom
Qui seul en fait le prix.
Dieux, quelle trahison !
César aurait dicté cet arrêt sanguinaire !