Page:Crépeau - Mascouche en 1910, 1910.djvu/8

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
7
MASCOUCHE EN 1910

« Le premier, est une glace flottante, d’une prodigieuse hauteur : laquelle, après avoir causé et entretenu une tempête, l’espace de treize jours et plus, vint fondre, avec une impétuosité horrible, à une pique du vaisseau dans lequel cette sainte femme passait en Canada. Cette glace, au rapport de ceux qui estaient dans le vaisseau, et de la Religieuse même, qui la voulut voir après qu’elle fut passée et que la tempête eut cessé, était de la grandeur d’une ville considérable, escarpée, et munie de ses défenses. Il y avait des avances qui paraissaient comme des tours, audessus desquelles les glaçons s’estaient tellement eccumulez, qu’on les eut pris de loin pour des donjons ; et il y avait des pointes de glaces si élevées, qu’on n’en pouvait voir la cime, à cause de la Brune. Cet écueil fut vue du coté du Nord, où le vaisseau avait été emporté par la tempête. »

« L’autre accident est encore plus surprenant, et peut-être inouy. C’est un tremblement de terre qui commença le mardi gras, 5 Février de l’an 1663, sur les cinq heures et demy du soir, et dura dans sa force, dans presque tout le Canada, jusqu’au mois de juillet. Quoy qu’il ne fut pas continuel, la terre ne laissait pas d’être agitée plusieurs fois le jour et la nuit, et chaque secousse durait un demi quart d’heure, un quart d’heure et quelquefois une demi heure entière. Plus de six mois après, la terre trembla encore de temps en temps, mais avec moins de violence : si bien qu’on peut dire que son mouvement dura plus d’un an. »

« Ce tremblement agita plus de quatre cents lieues de Paiis : Tadousac, Québec, Sillery, les trois Rivières, Montréal, les Hiroquois, l’Acadie et la nouvelle Hollande en ressentirent les secousses, avec d’autant plus de violence, que le fond de ce Paiis, qui est presque tout de marbre, résistait plus fortement au feu ou à l’air, qui estaient enfermez dans le sein de la terre et qui faisaient des efforts pour en sortir. »

« Les effets en furent si terribles et si prodigieux, qu’on aurait de la peine à les lire, même dans ce Livre, et beaucoup plus à les croire, s’ils n’étaient arrivez de nos jours, et s’ils n’avaient pour témoins une infinité d’habitans de tous ces Paiis, qui vivent encore. L’on voyait des montagnes s’entrechoquer, d’autres se jettaient dans le grand fleuve de Saint Laurent, quelques autres se sont enfoncées dans la terre : il y en eut qui se sont détachées de leurs fondements, et qui ont avancé plus de cent brasses dans le fleuve, portant et retenant leurs arbres et leur verdure. Les montagnes des deux côtez se sont perdues et égalées aux campagnes voisines, plus d’une lieue sur le Fleuve, et il y a un espace de plus de cent lieues, tout rempli de rochers et de montagnes, qui s’est tellement applani, qu’il fait aujourd’huy une grande plaine, aussi égale que si elle avait esté dressée au niveau.