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Page:Crépet - Charles Baudelaire 1906.djvu/46

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Quand on a lu ces strophes, on admet sans aucune difficulté que l’état d’esprit et les habitudes de vie, qu’elles attestent, étaient de nature à inquiéter les parents du poète[1]. D’ailleurs, ils avaient de très sérieuses rai-

  1. Mme Aupick écrira un peu plus tard à M. Ancelle :

    « … Il m’est resté une impression bien pénible de tout ce que vous m’avez dit l’autre jour par suite d’une conversation que vous avez eue avec Charles, il y a peu de temps ; ce mépris souverain pour l’humanité, ne pas croire à la vertu, ne croire à rien, tout cela est effrayant et me bouleverse. Tout cela me donne à penser et me fait peur ; car il me semble que lorsqu’on ne croit à aucun sentiment honnête, il n’y a qu’un pas de là à une mauvaise action et cette idée seule me fait frémir ; et moi, qui me complaisais dans la pensée que mon fils, malgré son désordre et toutes ses idées extravagantes, était rempli d’honneur et que je n’aurais jamais à redouter aucune action vile ; j’en avais pour garant aussi son orgueil et une certaine fierté dans l’âme, sans ajouter que je lui croyais un fonds de religion, sans pratique, mais ayant la foi.

     » Voyez dans quelles tortures je vis, au sujet de Charles, car je ne puis me dissimuler que sa position va en s’empirant ; elle empire par la raison qu’elle se prolonge et que les années marchent. Ce n’est pas faute cependant d’adresser les prières les plus ferventes à Dieu pour son changement.

     » Si je me suis résignée à cette séparation, qui m’a été si cruelle et qui peut-être a été la cause de tous les désordres où Charles s’est jeté, c’est que j’ai cru bien faire et agir dans son intérêt : je n’ai pas voulu imposer à mon mari la vue d’un jeune homme, dont les idées et les habitudes cadraient si peu avec les siennes.

     » Comme femme, je ne vois en toutes choses que le sentiment. »