Page:Crépet - Charles Baudelaire 1906.djvu/78

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portement qu’elle fut, jeune encore, frappée de paralysie. Baudelaire la fit entrer, à ses frais, à l’hospice Dubois[1] et se trouva, comme toujours, victime des mensonges et des ruses, dont cette malheureuse fille se servait pour lui soutirer de l’argent. Sans se laisser rebuter par l’ingratitude et la perversité de sa maîtresse, il n’en continua pas moins de subvenir à ses besoins, et lorsque, prenant en horreur la maison de santé, dont le régime entravait ses habitudes d’intempérance, elle voulut en sortir avant la guérison, le poète, loin de l’abandonner, vint habiter avec elle.

Cette vie d’intimité complète ne pouvait lui être que douloureuse. Il faut lire, dans ses lettres à Poulet-Malassis, quelle étrange complication vint encore aggraver, pour lui, les ennuis de ce faux ménage, et gâter le seul plaisir qu’il en espérait, celui de « causer avec une femme vieille et infirme[2] ».

Après cette dernière déception, qui mit fin, pour toujours, à l’existence commune, les relations qu’il garda, jusqu’à la fin de sa vie, avec Jeanne, n’ont pas laissé de traces dans la correspondance du poète ; mais on doit croire qu’il ne cessa de lui venir en aide, même après qu’il eut fixé sa résidence en Belgique, malgré

  1. Elle y entra le 5 avril et en sortit le 19 mai 1859.
  2. Lettre du 16 janvier 1861.

    Non contente de soutirer à son malheureux amant toutes les maigres sommes qu’il parvenait à se procurer, elle lui faisait nourrir son frère : « À travers beaucoup de pleurs, j’ai obtenu de la créature l’aveu que, depuis un an, son frère vivait chez elle, mais qu’il lui avait prêté 200 francs ! »