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SOUVENIRS

servation et de narration tout-à-fait piquant, mais pour savoir et pour avoir dit combien sa première protectrice était singulière, il aurait fallu qu’elle eût pu causer familièrement avec elle, et voilà ce qui n’est jamais arrivé. La Duchesse de la Ferté ne trouvait jamais un mot à dire à Mlle  Delaunay, à moins que ce fût quelque parole de condescendance et de protection. Celle-ci n’avait donc pu la juger autrement que sur ce qu’elle avait dit devant elle-à d’autres personnes ; mais pour vous donner une idée de ce que c’était, quand elle ouvrait pour vous les trésors de sa confiance, écoutez l’histoire de ma première visité chez ma tante de la Ferté[1].

Nous savions qu’elle s’était foulé le pied en descendant l’escalier de la surintendance à Versailles ; elle s’était fait ramener chez elle à Paris, où nous arrivons, moi derrière ma grand’mère, ayant Mademoiselle d’Armagnac en première ligne ; c’est-à-dire avec les deux personnes les plus exactement formalistes de la cour et de la ville, y compris les Présidentes à Mortier[2]. Elle était établie sur son estrade et son lit de parade entre quatre colonnes

  1. Marie-Gabrielle-Isabelle-Angélique-Sylvie de la Mothe-Houdancour de Cantonne, Duchesse-Douairière de La Ferté-Saint-Nectaire, morte à Paris, en 1756, âgée de 72 ans.
  2. Charlotte-Agnès de Lorraine d’Armagnqc, née le 6 mai 1678, morte le 21 février 1757. Elle était fille du Prince Louis de Lorraine, Grand-Écuyer de France, et de Catherine de Neufville-Villeroy, dont la mère était Madeleine de Créquy.
    (Note de l’Auteur.)