Page:Créquy - Souvenirs, tome 2.djvu/167

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
163
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

à les mettre en ordre tandis que je vais écouter M. de Richelieu dans cette même chambre. — Saurez-vous parler tout bas ? demandai-je à M. de Richelieu.

Le Marquis n’était pas tellement préoccupé de ses papiers qu’il ne regardât souvent de notre côté, et tout de suite après les premières paroles de la conférence, il aperçut que j’avais eu l’air d’éprouver une satisfaction très vive. — Otium ? disait M. de Richelieu. Otium ! Otium ! lui répétais-je. – Écrivez-moi donc ce mot-là pour que je n’y fasse pas de faute, et surtout gardez-moi le secret !…

Je m’étais approchée de la table où votre grand-père épluchait ses lettres et j’écrivis sur un morceau d’enveloppe Hic jacet Otium ; mais celui-ci m’arracha le papier des mains, avec un air moitié jovial et moitié colérique. — Eh bien ! dit-il, Otium ? c’est l’oisiveté !

— Oui, Monsieur, c’est la mère de tous les vices.

Ci-gît l’Oisiveté : À qui donc comptez-vous appliquer cette épitaphe ou plutôt cette épigramme-là ?

— C’est à la mère du Régent, si vous permettez ; du Régent, père de la Duchesse de Berry, de Mme de Modène, de la Reine Louise, de Mme de Chelles…

— Et de Mlle de Beaujolais, ajouta M. de Créquy, — n’est-il pas vrai, Richelieu ?

— C’est une idée, reprit M. de Richelieu sans répondre à mon mari, c’est une idée qui m’est venue tout de suite après la mort de Madame ; mais j’ai mis bonne garde à ne pas la dire en français, de peur que son fils ne me renvoie à la Bastille, au