c’est ainsi qu’elle en est sortie régulièrement deux ou trois fois par jour pendant douze ou treize ans. Tous les amis de la famille et tous les hôtes du château de Newiemsko ont été les témoins de ce que je vous rapporte ici.
Cette jeune personne était devenue de la figure la plus ravissante : elle était grande, élancée ; elle avait les cheveux et les sourcils d’un noir de jais, avec les yeux d’un bleu sombre et doux. Elle était d’une telle blancheur qu’on aurait dit un marbre de Carrare, et l’on n’a jamais vu un col avec des épaules et des bras si parfaitement admirables. Le surplus se trouvait encore un peu dans les futurs contingens ; mais, à tout prendre, c’était la plus charmante et la plus aimable jeune fille qu’on puisse imaginer.
Voici la fin de son histoire, ainsi que je la tiens du Prince d’Hohenlohe. En 1797, il se trouvait au château de Newiemsko, pendant les fêtes de Noël, dans une réunion de cinquante à soixante Magnats et Dames du voisinage, y compris les Demoiselles et les jeunes Seigneurs que leurs parens avaient amenés avec eux, suivant l’usage du pays ; et tous ces jeunes gens voulurent se livrer, après l’office du soir, à une espèce de divertissement qui est originaire de France, où il est passé de mode, et qu’on appelle en Gallicie la Course du Roi. Il est question d’aller s’établir dans la grande salle du château et, pour la première fois de sa vie, la Comtesse Agnès n’en montre aucune frayeur. Son oncle observe tout bas qu’elle est devenue bien raisonnable, et la Princesse ajoute que sa résolution provient sûrement