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SOUVENIRS

revenant du banquet de l’Hôtel-de-Ville ; mais revenons à Mme d’Egmont.

Son père arriva de Versailles, et lui dit, entre autres choses, que le Vidame lui avait rendu jadis, et du temps de sa première jeunesse, un service tellement signalé qu’il pourrait dire que le Vidame lui avait sauvé l’honneur et la vie. Il ajouta que si M. de Poitiers avait demandé à le voir lui-même, il n’aurait pas manqué de se rendre chez lui avec empressement ; mais que c’était sans doute par délicatesse et par discrétion qu’il ne voulait pas s’adresser à lui plus directement, afin de ne pas le discréditer. Le Maréchal ne doutait pas que son ancien ami n’eût quelque chose à lui faire dire, et peut-être quelque service à lui demander. — Retournez donc chez lui, dit-il à sa fille avec douceur, mais avec persistance ; il a sûrement une recommandation quelconque à me faire parvenir : c’était un courageux et généreux homme ! c’était, il y a cinquante ans, la plus aimable créature du monde, et je ne saurais, encore aujourd’hui, penser à cette preuve de dévouement qu’il m’a donnée sans en éprouver un juste ressentiment.

La Comtesse d’Egmont prit son parti de retourner chez le Vidame de Poitiers qu’elle retrouva dans son étable. Il avait l’air d’être à l’agonie, mais il retrouva des forces en la voyant paraître ; il ne sembla nullement embarrassé de ce qu’il avait à lui dire, et voici comment il y procéda méthodiquement.

Après les premiers complimens d’excuse et les remercimens les plus respectueux, mais sans parler