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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

fait scrupule d’encourager une autre femme dans la mauvaise conduite et le scandale, en usant d’un faux semblant de considération pour elle, et en simulant une apparence d’égards ou d’empressement qu’on aurait pu traduire en faux air d’approbation. Quoi qu’il en fût de ce procédé général, on nous dit au château que c’était le Roi qui lui avait voulu donner cette marque de bienveillance ou de commisération, qu’elle ne méritait guère ; on disait aussi que c’était par la raison que le Roi se rappelait toujours avec bonté que Mme de Parabère lui donnait à manger, pendant sa minorité, des gaufrelettes et des grimblettes à Bichon qu’il allait grignoter en arrière de l’Évêque de Fréjus, et surtout bien en cachette du Maréchal de Villeroy, qui disait continuellement que les familiers du Régent voulaient empoisonner Sa Majesté. Il ne serait pas impossible que ce fussent les criailleries du vieux Gouverneur qui eussent garanti la vie du jeune Roi. La Providence emploie tout le monde à ses fins, jusqu’aux imbéciles, et le Maréchal en avait tant et tant dit que, si le Roi fût mort, on n’aurait pas douté que ce ne fût par le poison. On aurait infailliblement lapidé Maître Dubois et consorts ; les parlemens auraient instrumenté, les provinces se seraient mises en révolte, et le Roi d’Espagne aurait trouvé bien des auxiliaires au cœur de la France. On a toujours pensé que la vie de cet enfant royal n’avait tenu qu’à ces craintes-là, et c’était l’opinion du Cardinal de Fleury, du moins[1].

  1. À propos de ce bon Cardinal et du Maréchal de Villeroy,