Page:Créquy - Souvenirs, tome 3.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
137
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

premier amant[1], M. le Duc d’Orléans s’éprit d’un tendre amour pour la Marquise de Montesson (autre comédienne), et celle-ci trouva le moyen de lui persuader qu’elle était la vertu même. C’était une femme à grands talens qui faisait des héroïdes et des comi-tragédies sous la dictée de son secrétaire, et qui jouait de la harpe admirablement ! À la vérité, Mme de Montesson s’établissait toujours, pour instrumenter de sa harpe, entre M. Nollot, son maître de harpe, et M. Danyan, premier élève de M. Nollot, qui jouaient de toutes leurs forces. Elle se tirait d’affaire au moyen de la pantomime, avec des airs de physionomie chromatique et des regards de sainte Cécile amoureuse. Elle ne voulait jamais jouer toute seule. Avec un si beau talent, c’était grand dommage ! et comme c’était par excès de timidité, M. le Duc d’Orléans s’en extasiait et n’en revenait pas.

Ce prince avait fait étaler dans un salon du château de Sainte-Assise une collection de miniatures et de charmans dessins qui provenaient du pinceau délicat, habile et gracieux de Mme de Montesson, laquelle n’avait pas voulu descendre de son appartement ce jour-là, toujours par modestie. Mme de Puysieulx[2], dont elle était abhorrée, se mit à

  1. Il avait donné la seigneurie de la paroisse de Villemomble à cette fille, dont il avait eu toute une couvée d’enfans qu’il a reconnus tant bien que mal, et qui n’en portent pas moins les armes d’Orléans, ce qui prouve assez comment tout est bien réglé dans cette maison-là.
    (Note de l’Auteur.)
  2. Charlotte Le Tellier de Louvois-Rébénac-Souvré-Courtanvaux, de Louis-Philogène Bruslard de Sillery, Marquis