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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

dignité nobiliaire et quel mépris de l’honneur militaire et national ! Quelle inconcevable distraction de l’autorité royale !… Ô malheureux temps, funestes jours où l’on a vu la pourpre de France et les fleurs-de-lis contaminées par la prostitution scandaleuse ! Ah ! Duc d’Aiguillon, mon pauvre cousin, que votre ministère a fait de mal et préparé de maux à notre pays ! Combien vos calculs de connivence ou de complaisance ont été coupables ! combien fertiles en scandales, en calamités, en désastres sanglans et sacriléges !


Mme de Boulainvilliers, femme du Prévôt de Paris, est, comme on sait, une charitable et angélique personne[1]. Elle passe ordinairement la plus grande partie de l’été dans son beau château de Passy, où son mari va souper tous les soirs et d’où il revient à Paris dès cinq heures du matin, pour son audience du Châtelet. J’admire toujours comment il se peut trouver d’honnêtes gens qui veulent bien exercer de pareils offices de judicature aux gages de neuf cent trente-six livres tournois ; mais j’en rends grâces à Dieu quand ce sont des hommes tels que M. Bernard de Boulainvilliers, Comte de Coubert et Marquis de Passy-sur-Seine, ayant soixante mille écus de rente avec du mérite et de l’honneur de reste (c’est celui que nous appelions autrefois le petit Bernard,

  1. Nicole-Marie de Catinat, Baronne de Saint-Mars et dame de Saint-Gratien, mariée en 1769, morte à Paris en 1791.
    (Note de l’Auteur.)