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SOUVENIRS

lequel était devenu Boulainvilliers par terre et par mère.

En s’en allant de Passy-sur-Seine un beau matin, il entendit mille cris douloureux qui partaient d’une maison de la rue Basse, habitation chétive et délabrée. Il descend de cheval et frappe à la porte de cette maison ; mais comme on n’ouvrit pas et qu’il était pressé d’arriver à Paris, il écrivit quelques mots, avec son crayon, sur un petit papier qu’il envoya porter à sa femme. S’il était question d’un acte de justice ou d’une œuvre de miséricorde, voilà ce que le laquais ne saurait dire aux femmes de Mme de Boulainvilliers, à qui son mari faisait ordonner de la réveiller sur-le-champ. Mme de Boulainvilliers se fait habiller en grande hâte ; elle envoie réveiller son valet de chambre chirurgien, fidèle et bon vieux serviteur qui la suivait habituellement dans ses visites de charité, et les voilà partis pour cette maison qui n’était guère éloignée du château de Passy, mais dont la porte était invinciblement close. En s’approchant d’une croisée du rez-de-chaussée, dont les contrevens étaient fermés comme la porte et toutes les ouvertures qui donnaient de ce même côté de la rue Basse, on entendait, par intervalles, un gémissement douloureux, des sanglots étouffés, un cri très aigu parfois ; et du reste aucun mouvement et nul autre bruit dans aucune autre partie de la maison.

Cependant M. de Boulainvilliers avait descendu la Roque des Bons-Hommes, et en passant devant le portail du couvent il aperçut deux personnages étrangement vêtus qui cherchaient à se cacher der-