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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

laissait crouler sa vieille forteresse de la Tour en Auvergne, on démolissait la plus belle moitié du château d’Amboise à l’effet d’y construire un petit logement pour Mme de Lamballe. C’est à qui s’efforcera d’arracher à la vieille Cybèle sa couronne de créneaux ! Si j’avais écouté mes bourgeois, mes fermiers et mes autres vassaux de Montflaux, j’aurais fait faire dans mon château des Gastines un fameux remue-ménage ! Ils savaient à n’en pouvoir douter que les Comtes d’Anjou, Geoffroy Grise-Gonelle et Foulques le Réchin y avaient enterré des trésors, et la tradition portait que c’était principalement des couronnes (comme s’ils en avaient eu de rechange).

— Je ne vous donnerai seulement pas, leur disais-je, l’argent d’un pic ou d’une pioche, et je vous assure que le premier qui s’avisera d’arracher une pierre à mes Gastines sera condamné par mes officiers de justice à l’amende et à la prison. J’irais plutôt ce jour-là présider mon audience en personne !

    Mme de Créquy avait pu juger de la conscience artistique et de la sollicitude respectueuse, on pourrait dire, avec lesquelles les propriétaires actuels de Chenonceaux ont fait restaurer, décorer et font entretenir cette ancienne habitation royale, elle se serait aisément consolée de la savoir sortie des mains du domaine fiscal, qui l’aurait négligée s’il ne l’avait fait démolir. Chenonceaux, dans son état présent, est le parfait modèle du vieux château rajusté pour habitation moderne, avec tous ses meubles et ses ornemens d’intérieur exactement appropriés au style intime de l’édifice. M. et Mme de Villeneuve ont droit à la reconnaissance des archéologues et des artistes de tous les pays. L’éditeur les prie d’excuser l’auteur : c’est le tribut d’un ami des arts qui leur est inconnu.

    (Note de l’Éditeur.)