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Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/112

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SOUVENIRS

de mettre ses appartemens et ses clefs à la disposition de M. de Caylus, dont on devait réparer le logement ; mais il n’en profitait guère, et tout donnait à penser que le service des illuminés ne se faisait que par les Champs-Élysées. Je ne doute pas non plus que Mme de Brunoy ne fût parfaitement étrangère à cet indigne emploi de son habitation.

On apprit dans la journée du lendemain que M. de Caylus avait été frappé d’un coup d’apoplexie foudroyante dans la petite maison de M. de Lauzun, rue du Roule, auprès des Champs-Élysées, d’où l’on rapporta son corps à l’hôtel de Comminges, rue de Grenelle, en face de l’hôtel de Créquy. Nos gens furent le voir, et disaient que sa figure était devenue comme celle d’un nègre. Aucun de ses proches parens n’était à Paris, il n’appartenait à personne de faire vérifier chirurgicalement la nature ou la cause de sa mort. Mme de Gèvres était dans son lit avec une fièvre chaude, et n’apprit cette nouvelle que lorsqu’il n’était plus temps de parler (parce que le cercueil de ce malheureux adepte avait été porté dans une église au fond du Rouergue, au milieu de la canicule et par une chaleur de 24 degrés).

Il est inutile de vous dire pourquoi les Balsamites ont été soupçonnés d’avoir fait mourir M. de Caylus. On a fait un nombre infini de broderies sur le même canevas d’histoire, où l’on n’a pas manqué d’ajuster les ornemens les plus merveilleux ; mais vous pouvez compter et vous pourrez vérifier auprès de Mme de Gèvres que voilà toute la vérité sur cette aventure. Je la tiens déjà pour honnêtement extraordinaire et passablement tragique.