Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
11
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

cons, sinon qu’en arrivant à Paris ils ont pris les armes des autres, qui sont un mouton blanc. Ils n’osaient pas dire alors qu’ils fussent parens du Chancelier, et la fille de ce grand magistrat, Mme Charlotte Séguier, Duchesse de Bourbon Verneuil et Duchesse douairière de Sully, ne l’aurait certainement pas souffert.

Savez-vous bien que c’était une importante et imposante figure que celle de M. Chérin ! On ne saura pas dans la postérité ce que c’était à nos yeux que Messire Bernard Chérin, Écuyer, Généalogiste de la Maison, du Roi, de la Cour de France et de l’Ordre du Saint-Esprit, comme aussi des grandes et petites Écuries de S. M. C’était la sévérité dans la probité, la discrétion dans la pénétration ; c’était la science et la conscience infaillibles. Préposé qu’il était à la garde de l’Œil-de-Bœuf, on aurait dit que c’était les barrières du Louvre et qu’il y veillait, inévitable et impénétrable comme la mort. Il avait le secret de plusieurs familles, qu’il ne trahissait jamais par aucune parole, aucun geste, aucun air de physionomie. On n’a pas idée de tous les égards et tous les airs de tendresse que lui prodiguaient Messieurs de Coigny et de Vaudreuil ; mais les Caraman n’osaient pas le saluer trop bas ni le courtiser trop visiblement, de peur de manifester trop d’inquiétude et de laisser voir un trop long bout de leur grande oreille. Enfin c’était un censeur impitoyable, un juge incorruptible, un magistrat non-seulement propre à siéger sur les fleurs de lis, ce qui n’est pas si rare et ne dirait pas assez, mais digne de s’asseoir aux pieds du crucifix, à côté des Lhopital et des