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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

ne sais quelle fatalité m’entraînait à faire cette malheureuse excursion !…

« Je quittai le grand chemin à Monte-Brugio, et, conduit par un villageois, je m’enfonçai dans un pays le plus sauvage que l’on puisse imaginer. Vers midi, nous arrivâmes à une masure toute ruinée que le guide m’assura devoir être une auberge ; je ne m’en serais pas douté à la réception de l’hôte, car, au lieu de m’offrir quelque nourriture, ou tout au moins quelques rafraîchissemens, il me supplia de lui faire part des provisions qu’il ne doutait pas que j’eusse apportées. J’avais effectivement quelques biscuits, des fruits secs et autre provende de carême que je partageai avec ce malencontreux aubergiste, ainsi qu’avec mon guide et mon valet.

« Je quittai ce mauvais gîte vers les deux heures après midi, et bientôt après j’aperçus sur le haut d’une montagne un vaste édifice dont je demandai le nom à mon guide, en m’informant s’il était habité. Il me répondit que dans le pays on appelait ce lieu Lo Monte, ou bien Lo Castello. Il ajouta qu’il était entièrement désert et ruiné, mais que dans l’intérieur on avait pratiqué une chapelle avec quelques cellules, où les Franciscains de Salerne entretenaient habituellement cinq ou six religieux. Il me dit ensuite : — « Il y a bien des choses à dire sur ce château, mais aussitôt qu’on commence à en parler, je m’enfuis de la cuisine et je m’en vais chez ma belle-sœur la Pepa, où je trouve toujours quelque