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Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/34

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SOUVENIRS

faire une visite de noces à Mme d’Estourmel, la femme de notre généalogiste, il arriva dans la chambre un gros garçon de 12 à 14 ans qui était encore en jaquette et qui se mit à dire à la nouvelle mariée :

— Donnez-moi donc votre bonnet pour m’amuser.

— Mon fils, lui dit Mme d’Estourmel, il ne faudrait pas vous exprimer de cette manière, et surtout avec Madame, à qui vous allez parler avec une grosse voix… On dit : « Mme la Comtesse, je serais bien aise de jouer avec votre jolie coiffure ; auriez-vous l’extrême bonté de me la prêter ? » Je ne me souviens plus si Mme de Puysieulx avait eu la complaisance de laisser décoiffer sa jeune mariée pour satisfaire cet aimable enfant. Elle en était bien capable, afin d’en avoir un sujet mieux conditionné pour se moquer de la tendre mère et du charmant héritier des Cretin-Creton.

Vous n’exigerez sûrement pas que je vous raconte tous les détails d’un procès qui n’a pas duré moins de quatre ans ; vous en aurez tous les factum et les plaidoiries à votre disposition. Ainsi je me borne à vous dire que, malgré la protection du Marquis Cretin et celle de la Comtesse le noir souci, M. le Comte de Créquy le jeune fut condamné, par arrêt du Parlement de Paris, à quitter le nom de votre famille et par suite de cela son titre de Comte. Il avait été chargé de la totalité des frais du procès, et voilà qui fit saigner mon bon cœur, attendu que sa famille était à sa charge et qu’il était dépourvu de fortune. Aussi lui refusa-t-on d’accepter le remboursement des frais d’enquêtes, et quand il arriva pour déposer son amende au greffe, on lui répondit que tous les frais