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SOUVENIRS

bre un de mes criados : je ne vis et n’entendis rien, non plus que les six nuits d’après ; mais, dans celle du vendredi au samedi, j’eus encore la même vision, avec la différence que mon valet me semblait couché à quelque distance de moi sur le pavé de la Strada-Stretta. Le Commandeur m’apparut : il me dit les mêmes choses ; et la même vision se répéta successivement tous les vendredis. Mon criado rêvait alors qu’il était couché dans une petite rue fort étroite ; mais du reste il ne voyait ni n’entendait le Commandeur.

« Je ne savais ce que c’était que Têtefoulques, où le défunt voulait absolument que je fusse porter son épée. Des Chevaliers poitevins m’apprirent que c’était un vieux château qui se trouvait à quatre lieues de Poitiers, au milieu d’une forêt ; qu’on en racontait dans le pays des choses extraordinaires, et qu’on y voyait beaucoup d’objets curieux, notamment l’armure du fameux Foulques Taillefer, avec les armes de tous les guerriers qu’il avait tués. On me dit aussi que l’usage immémorial de tous les Foulquerre avait toujours été d’y faire déposer les armes qui leur avaient servi, soit à la guerre, soit dans leurs combats singuliers.

« J’allai d’abord à Rome, où je me confessai au Cardinal Grand-Pénitencier. Je ne lui cachai pas la vision dont j’étais obsédé, et il ne me refusa pas l’absolution que méritait mon repentir ; mais son Éminence ne me la donna que conditionnelle, après ma pénitence future, et les cent messes au château faisaient partie de cette prescrip-