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Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/95

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

tion. J’avais eu soin d’apporter de Malte l’épée du Commandeur, et je pris le chemin de la France aussitôt qu’il me fut possible.

« En arrivant à Poitiers je trouvai qu’on y était informé de la mort de M. de Foulquerre, et il me sembla qu’on n’en était pas plus affligé qu’à Malte. Je laissai mon équipage en ville, et je pris le costume d’un pèlerin avec un guide. Il était convenable de me rendre à pied jusqu’à Têtefoulques, et puis d’ailleurs aucun chemin de ce comté de Poitou n’aurait été praticable pour des voitures.

« Nous trouvâmes toutes les portes du château fermées, et nous sonnâmes long-temps à la porte majeure avant que le concierge ne parût. Il était le seul habitant de Tétefoulques, avec une espèce d’ermite qui desservait ou plutôt qui nettoyait la chapelle, et que nous trouvâmes occupé à psalmodier l’office des morts, ce qui me parut lugubre au dernier point. Lorsqu’il eut fini de chanter je lui dis que j’étais venu pour accomplir une obligation de conscience, et que j’avais l’intention de lui faire dire cent messes pour le repos de l’âme du Commandeur. Il me répondit qu’il ne disait jamais la messe, parce qu’il n’était pas dans les ordres, mais qu’il se chargerait volontiers d’en faire acquitter ma conscience.

« Je déposai mon offrande sur l’autel, et je voulus y déposer aussi l’épée du Commandeur ; mais l’ermite me dit avec un air sombre que ce n’était pas la place d’une épée si meurtrière et si