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SOUVENIRS

à Madame de Créquy, à l’amie de son père… — Il avait dit que j’étais… — Et comment n’ai-je pas su qu’il avait dit… — Ah ! Dieu de miséricorde ! et j’avais pu douter de votre bonté ! pardonnez-moi mon défaut de lumière ! pardonnez-moi mon ignorance et mon aveuglement, mon défaut de confiance en vous ! — Mais voilà tout le monde qui sait à présent que je me suis empoisonnée… Hélas, Madame ! ayez la bonté que mon pauvre corps ne soit enfoui sous la potence et traîné sur la claie !… — Malheureuse enfant, lui dis-je alors, mettez-y de l’humilité, du courage et de la résignation ! je ne saurais vous promettre de l’empêcher et peut-être ne le voudrai-je point, si notre créateur ne vous permet pas de vous réconcilier avec lui… Faites-en le sacrifice à Dieu, au prochain, pour le bon exemple ; je ne saurais en conscience entraver la justice de Dieu. Repentez-vous de ce grand péché, de ce crime affreux que vous avez commis… — Et Monseigneur ?… — Il est aussi malade que vous… — Ah ! tant mieux ! tant mieux ! Nous allons nous rejoindre !… — Voyez ces papiers, me dit-elle en m’indiquant deux lettres dont je reconnaîtrais les écritures entre deux cent mille, et dont je ne me rappellerai jamais le contenu sans éprouver un sentiment d’horreur et de terreur.

La première en date était un billet insidieux et mesuré dans ses termes, où l’on représentait les précautions, la prudence et toute la conduite d’un jeune prince que l’on n’osait pas nommer à l’adorable