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SOUVENIRS

doute, et c’était d’ailleurs une mystification scientifique, ainsi que vous allez voir.

Il écrivit donc un Essai sur l’organisation présumable des jeunes Centaures, dissertation qu’il adressa par la poste à son voisin M. Rouelle ; et celui-ci ne manqua pas de crier au voleur. — Il n’est pas, disait-il, une seule observation de ce plagiaire inconnu qui n’ait été pillée, effrontément pillée dans mes discours ou mes écrits !

Quand on l’avait fait sortir de ses cucurbites et de ses matras, il n’avait plus aucune sorte d’idée raisonnable. Toute pensée d’obligation religieuse ou de spiritualité lui était si complétement étrangère que le mot crime et le verbe pécher ne lui donnaient aucune autre idée que celle du plagiat. Dieu, l’Ame et l’Avenir étaient pour lui néant, rien, moins que rien ; le doute lui manquait faute d’idée, et la brute n’avait pas plus de sécurité. — L’homme est un tube actif et digestif, ouvert à ses deux extrémités : voilà sa définition de l’homme, et c’est tout ce qu’il avait vu dans l’Évêque de Marseille, le Président de Coste et le Maréchal du Muy, ses bienfaiteurs.

M. de Beauvau m’a conté qu’on parlait un jour, chez M. de Buffon, des mouvemens naturels, et que c’était dans son cabinet, au Jardin du Roi. — Il m’est impossible, dit le Cardinal de Bernis, de ne pas baisser la tête lorsque j’entre dans une église.

— Il y a comme cela des mouvemens matériels et machinaux qu’il est impossible d’analyser et d’expliquer, observa le professeur de chimie ; car enfin, Monseigneur, pourquoi les ânes et les canards baissent-ils toujours la tête en passant sous