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Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/126

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SOUVENIRS

même à celles d’Amérique, où notre pays se trouvait engagé ; l’oisiveté des gens du monde et le manque de croyance avec le besoin de croire, enfin la manie d’enthousiasme ou d’engouement qui gagnait toutes les classes, et qui remplaçait chez nous toutes les opérations du jugement, telles que l’examen attentif et l’approbation raisonnable : tout cela, vous dirai-je, ouvrait une large brèche aux folies imaginatives, aux données incompréhensibles, aux explications inconcevables et tout ce qui s’en suit en fait d’absurdités.

Au milieu de ce tourbillon, parut un homme imposant par son air de sécurité fière et de cogitation méditative ; un savant, un étranger (ce qui doublait nécessairement son mérite) ; et de plus, un homme assez jeune et parfaitement beau, ce qui n’y gâtait rien. Cet homme était en possession d’un secret qui maîtrisait tous les corps animés, et qui lui donnait la faculté de remédier à toutes les désorganisations de leur mécanisme, à toutes les causes de souffrance, à tous les maux physiques, à toutes les pénalités de la nature humaine ; et c’était par un principe universel, occulte, unique, et tellement simple dans son essence et dans le mode de son application, qu’il n’avait pas besoin d’un autre moteur et d’un autre agent qu’un acte de la volonté.

On apprit bientôt que le Docteur Mesmer avait trouvé des adeptes, et l’on distingua particulièrement Messieurs de Puységur, de la Fayette, Bergasse et d’Espréménil, parmi ses disciples ses plus fervens. Il s’était logé dans la maison des frères Bouret, place Vendôme, et voici comment on y procédait à l’application du magnétisme.