Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/8

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

serais pas étonné qu’il ne voulût déclarer la guerre aux Turcs, et, par ma foi j’en serais bien aise, à cause de l’estime et l’amitié que j’ai pour les Transylvains ! Vous pensez bien que des comédiennes et des comédiens ne comprenaient pas grand’chose à cette affection pour les Battoris et les autres Magnats de Transylvanie.

M. de La Vaupalière, qui n’avait rien de bien grave, était pourtant confondu de la prodigieuse légèreté de ce vieillard, et surtout de son défaut de mesure. — « Je prends mon parti de ne pouvoir obtenir la permission d’aller à Versailles, disait-il un jour en présence de sept à huit personnes. Si le Roi n’avait pas songé qu’il pouvait me parler de ma chasse de Ferney, il m’aurait ri au nez avec son affabilité ordinaire. La Reine ne m’aurait parlé que de mon théâtre ; Monsieur m’aurait demandé le compte de mes revenus ; Madame aurait bien voulu me citer un ou deux vers de mes tragédies ; M. le Comte d’Artois m’aurait dit quelque malice, et Mme la Comtesse d’Artois ne m’aurait dit rien du tout. Voilà ce qui me serait arrivé ; je n’en dirai pas davantage… » Et moi je vous dirai que tout ceci fut trouvé prodigieusement insolent !

La dernière fois que Voltaire ait dîné à table chez M. de Villette, il y avait beaucoup de beau monde, et comme il n’aperçut pas devant son couvert un certain gobelet qu’il avait fait graver à ses armes, et qu’il avait apporté de Ferney, — Où est mon gobelet ? demanda-t-il, en se retournant avec des yeux étincelants du côté d’un grand benêt de