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SOUVENIRS

les personnes et les actions religieuses, on y cherche toujours un intérêt, une cause, un mobile étranger à la piété ; on y suppose le plus souvent des intentions tout-à-fait contraires à celles des personnes dont on veut juger la conduite ; et voilà qui fausse indignement l’esprit !

Il est un point de vue plus élevé que ce monde d’où l’on doit regarder les choses de la terre afin de les pouvoir comprendre ; mais on a besoin que la révélation divine et la religion vous tendent la main pour vous faire monter jusque-là.

Il y avait trois choses de notre temps que Mme  de Tessé ne pouvait jamais s’expliquer, c’était la profession religieuse de Madame Louise de France, la conversion du Prince de Wurtemberg et les austérités de la Comtesse de Gisors…

— Ne vous en tourmentez donc pas, — lui disais-je, et résignez-vous à n’y rien comprendre. Quand on est dans les conditions d’incrédulité philosophique où vous vous trouvez, il faut absolument que l’intelligence et la judiciaire en souffrent. Il y a plus de la moitié des choses de ce monde dont vous ne sauriez vous rendre compte, et ce que vous pouvez faire de mieux pour agir conséquemment à votre système, est de supposer que tous les dévots sont des ignorans ou des fourbes ; c’est une absurdité, j’en conviens, mais grâce à la philosophie qui vous éclaire et vous conduit, vous n’avez aucune autre ressource : j’en suis fâchée pour vois, mais prenez-en votre parti.

Comme elle avait été bien élevée, c’est-à-dire religieusement, elle en conservera toujours et forcément