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Page:Crevel - Babylone, 1927.djvu/183

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aujourd’hui encore complète bien qu’un peu défrisée.

— J’avais des aigrettes, des poufs, des panaches, Amie. Voyez cette amazone. Elle vient d’un feutre de chasse très genre mademoiselle de Montpensier. J’ai de quoi orner mes chapeaux jusqu’à la fin de mes jours, car voyez-vous, d’avoir mené la vie de cour, j’ai conservé le goût du décorum. Les petits bibis drôlement retournés qu’on porte aujourd’hui, sans doute ça vous a un petit cachet. Mais pas pour deux sous de majesté. J’aime les robes à traîne, le rêve, les séances du trône. Pour sûr le Roi m’aurait épousée, si sa femme, une Hohenzollern, ma parole, ne se l’était attaché par des fausses-couches. Quand même il l’aurait répudiée. Hélas, on ne lui en a pas laissé le temps. Il a été assassiné. Fini mon ciel sur la terre. Heureusement que j’ai trouvé de quoi me consoler un peu. L’éther, la morphine, le chloroforme, la coco… En désirez-vous ? Une petite prise ?

— Volontiers, accepte Amie, qui ne veut point paraître démodée.

Quelques jours plus tard, Amie confie à la Reine :

— J’ai jeté au diable l’Eau de mélisse des Carmes