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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/91

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mesure, nous n’arrivons pas même à devenir un peu plus sûrs de notre existence puisque, du mal que nous nous faisons, nous ne nous suffisons pas, puisque, triomphant de quelques dégoûts épisodiques, nous essayons d’autres expériences, frappons à toutes les portes, buvons à tous les verres, et, au petit matin, nous rejoignons sans le goût de ces utiles mensonges qui pourtant retrouvent leur couleur avec le soleil.

Hélas ! femme, dans une salle embuée de sommeil, à l’aube d’un printemps dont nous ne savions que faire, nous n’avons pas eu le bonheur de dormir, les coudes sur la table grasse. Nous n’avons pas eu le bonheur de dormir ni le courage de récompenser nos âmes. Ni l’odeur du café, ni celle du lait ou de la sueur humaine, ni le bourdonnement du percolateur n’assourdissaient notre angoisse.

L’œil clair, l’oreille exacte, nous avons rêvé, nous avons souhaité d’être enterrés