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518 CHAPITRE XI. — LES TRAVAUX ET LES JOURS

ressent et captivent les esprits sans les satisfaire. L'obscurité et l'indécision de la pensée, derrière la clarté vigoureuse de la peinture, créent une sorte de profondeur mystérieuse, où toute une nation va chercher pendant des siècles une sagesse qui se dérobe toujours.

��Mais ni la beauté des mythes ni la valeur des ex- hortations morales n'ont été les principales raisons du succès des Travaux. C'est surtout à titre de poème rustique que cette grande œuvre a été admirée do l'antiquité grecque et latine, et c'est encore à ce titre qu'elle nous plaît le plus aujourd'hui. Nous y sen- tons une poésie de la nature, non pas complète ni semblable à la nôtre, mais originale et profonde, une sorte de parfum de la terre, dont la saveur est exquise autant qu'elle est saine.

Les aèdes homériques avaient peint déjà la nature, mais en général ils ne la voyaient guère que sous ses aspects majestueux; ce qu'ils nous représentent le plus souvent, dans les comparaisons de V Iliade^ c'est la mer, tantôt calme et tantôt soulevée, ce sont les montagnes qui se dressent au-dessus des flots, les cimes environnées de nuages ou baignées dans la lumière pure, les vallées sauvages où les chasseurs poursuivent les botes féroces, en un mot tout ce qui offre à l'imagination un grand spectacle. Les champs cultivés eux-mêmes, lorsqu'ils les décrivent, pren- nent un aspect grandiose; vastes plaines d'Ionie, qui se déroulent jusqu'à Thorizon, et où un peuple de serviteurs travaille sous l'œil du maître. Qu'on

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