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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t2.djvu/173

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L'ËPIGRAMME 161

nous reste sous son nom trois épigrammes formées cha- cune d*un distique : la première est une inscription funé- raire, la seconde une inscription votive, et la troisième, s'il était certain qu'elle fût d'Archiloque, serait peut-être le premier exemple d'une épigramme au sens moderne du mot, c'est-à-dire d'une petite pièce de vers qui n'a plus d'une inscription que la forme extérieure, et qui enferme en peu de vers une pensée satirique K L'emploi du vers élégiaque dans l'épigramme fut une trouvaille d'artiste : l'épigramme eut dès lors sa forme propre et définitive. On put bien encore, çà et là, composer des épigrammes en hexamètres ou en iambes, mais ce fut l'exception. Le distique élégiaque est la forme par excel- lence de l'épigramme en vers; il encadre et détache la pensée à merveille; la netteté piquante de la forme con- duit insensiblement, selon le mot de La Bruyère, « à y mettre de l'esprit »; le distique est une sorte de mé- daillon; nul cadre mieux approprié à l'expression d'une pensée courte et fine. C'est ainsi que l'épigramme, par la nature même du procédé technique, est devenue souvent railleuse, et que le mot a pris peu à peu son sens mo- derne. Au temps oi^ nous en sommes, elle n'est que rarement satirique. Elle ne cherche pas les pointes. Elle est encore très simple, très naturelle, avec je ne sais quoi de ferme et de large à la fois dans le dessin. Mal- gré la petitesse du cadre, elle est classique et grecque au plus haut degré, comme une belle médaille d'Athènes ou de Syracuse, par la justesse harmonieuse, sobre, ex- pressive de la pensée aussi bien que de l'exécution ^.

1. Je ne parle pas des épigrammes dites homériques, qui présen- tent souvent le caractère do n'être plus dos inscriptions, mais de petites pièces de vers faites à l'imitation des inscriptions. Ces épi- grammes prétendues homériques sont probablement toutes posté- rieures à Archiloque ; si elles sont en hexamètres, c'est qu'elles pro- viennent sans doute des écoles de rapsodes. Cf. 1. 1, p. 591.

2. Le dialecte, dans les épigrammes, n'est pas toujours ionien

Hi.it. d« U Litt. gn»cqu«. — T. II. 11

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