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394 CHAPITRE VII. — PINDARE

cette lettre est obscure, mais le souci d'harmonie qui préoccupait Pindare est clair. Denys d'Halicarnasse re- marque comme il sait détacher les mots, les faire valoir en les isolant par de certaines rencontres de consonnes qui forcent d'appuyer davantage sur la voyelle ^ Il les rehausse aussi par le rythme, en mettant les accents rythmiques sur les syllabes el sur les mots à effet ^. Mais il s'en sert surtout merveilleusement pour exprimer des idées, des sentiments, des images qui tiennent au fond même de &on génie. Le philosophe Arcésilas disait de Pindare qu'il pouvait donner mieux que personne à ceux qui le pratiquaient un style sonore et leur fournir une ample provision de mots ^ A vrai dire, ce qui abonde dans Pindare, ce sont les figures plus encore que les mots : qu'on prenne une de ses odes au hasard, depuis le premier vers jusqu'au dernier, ce no sont que méta- phores brillantes, périphrases expressives, épitUètes, alliances de mots neuves et poétiques. C'est toute une langue que le poète a façonnée à son usage et qui est bien à lui.

La nature visible tout entière se réfléchit dans son ima- gination ; mais en même temps sa pensée, déjà philoso- phique et active, pénètre la nature et la spiritualise. De sorte que, d'une part, en vrai poète, il exprime les idées abstraites par des images, et que, de l'autre, il peint les objets concrets à la fois aux yeux et à l'esprit, dans leur effet pittoresque et dans leur rapport avec la loi géné- rale dont ils offrent une application : sa langue est (\ la fois plastique et abstraite, imagée et générale. La race d' Arcésilas, selon le poète, a été « plantée » par la main des dieux * ; non seulement sa race, mais sa gloire *. Les

1. Denys d'Halicarnasse, Arrangement des mots, c. 22.

2. Poésie de Pindare^ p. 391.

3. Diogèno Laôrcc, IV, 31.

4. Pyth. IV, 452.

5. Ibid., 122. ...

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