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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t2.djvu/487

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OKIGINES DE LA PHILOSOPHIE GRECQUE

philosophe ne s’autorise que de sa raison ; il cherche par- tout la trace d’une loi rationnelle; s’il garde parfois dans son langage les noms traditionnels dos divinités populaires, ces divinités sont pour lui tout autre chose que pour la foule : elles prêtent la diversité de leurs noms à l’unité fondamentale de la loi qui mène toutes choses. Une autre différence, c’est que les nouveaux systèmes re- posent sur une connaissance beaucoup plus étendue et précise des faits à expliquer. Bien que la science, à cette période de son développement, soit plus pressée d’expli- quer que de savoir, bien qu’elle ait hâte de se jeter dans les hypothèses et dans la métaphysique, elle étudie ce- pendant et elle observe ; elle perfectionne l’astronomie, la géométrie, la science des nombres. Elle a d’ailleurs pleine conscience de son originalité et de son indépen- dance. Chez plusieurs de ses premiers représentants, on trouve de vives attaques contre la religion des poètes, contre les croyances du vulgaire. Ces penseurs sentent à merveille qu’ils sont une élite, et qu’ils foulent, pour parler comme Lucrèce, des routes que nul avant eux n’avait explorées.

A ce sujet, pourtant, un doute peut s’élever : est-ce uniquement de leurs propres recherches qu’ils ont tiré leurs conceptions ? ou ne les ont-ils pas empruntées au contraire en grande partie à ce monde oriental et égyptien qui enveloppait la Grèce de sa mystérieuse antiquité, et qui, durant tant de siècles, avait accumulé, lui aussi, les observations et les systèmes? En fait, on trouve çà et là, entre les systèmes des premiers philosophes grecs et certaines doctrines orientales, des points de ressemblance dignes d’attention. De plus, les Grecs eux-mêmes ont volontiers parlé des influences orientales, des leçon.i qu’ils avaient reçues de l’Egypte ou de la Chaldée; ils font voyager leurs grands hommes en Orient; ils prêtent à Pythagore, à Platon, des voyages de ce genre, sans compter