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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t2.djvu/522

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510 CHAPITRE IX. — PHILOSOPHIE ET HISTOIRE

éternelles transformations. L'âme humaine est une âme divine en état de mort ; Tâme divine est une âme hu- maine en état d'immortalité, les termes de mort et d'immortalité n'étant pris, bien entendu, qu'en un sens relatif et limité *.

Il y a pourtant, au dessus des hommes et des dieux, plus ou moins éphémères, quelque chose de suprême et d'éternel qui gouverne tout : c'est la loi même de ces changements, qu'Heraclite appelle tour à tour la Pensée (Yvwjjly)), la Justice (Sixyj), le Temps (alwv), ou Zeus. A vrai dire, il ne tient pas au mot. « La seule sagesse, dit- il, est de connaître la pensée qui gouverne toutes choses à travers tout; elle veut et ne veut pas qu'on l'appelle Zeus 2 ; » c'est-à-dire que le nom importe peu, pourvu qu'on sache ce qu'on entend par le nom, et qu'on ne l'entende pas au sens vulgaire. Ce dieu suprême n'a rien crée ^ ; il préside aux changements des choses, comme un enfant qui joue aux dames dirige les combinaisons des pièces *. Dans quelle mesure Heraclite accorde-t-il à ce Zeus, à cette pensée suprême, la conscience et la per- sonnalité ? Est-ce là pour lui un être vivant, ou une sim- ple loi abstraite et une divinité métaphysique? La seconde hypothèse semble mieux d'accord avec le système, mais on ne saurait dire au juste ce qui en est. Cela tient au langage d'Heraclite, qui garde volontiers les mots an- ciens pour dire des choses nouvelles. « Si le soleil, dit-il quelque part, s'écartait de sa route, les Érinnyes, ser-

1. Fragm. 62 : 0eoi 6vy)toI âvOpwTtoi t' àSavatoi, C(î>vTec tov éxeivciiv ÔavfliTov, OvTQffxovTc; tV Ixetvuv Ç(i)r,v.

2. Je réunis, avec M. Gomperz {Silzungsberichte d. Akad, d. 1V«- sensch., Vienne, 1886, p. 1005) les deux fragments 19 et 61 (Bywater) en un seul : "Ev to œo^^v (loOvov, iizlaxaa^on yvco(IiY|v v) xu€cpv&Tai navre ttcL 7cavT(i>v * XÉYeo-Oai lOiXsi xa\ oûx é8éXei Zr,voc oCvo|&a (fragm. 12 et 55, MuUach).

3. Fragm. 27.

4. Fragm. 44.

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