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HERACLITE 511

vantes de Zcus, l'y feraient rentrer *. » La pensée est (l*un philosophe, le langage est d'un poète. Ce mélange ost chez lui perpétuel. Il parle volontiers comme le vul- gaire en pensant autrement. II fait déjà comme feront plus tard les Stoïciens, qui sauvent la pureté de la doc- trine par des sous-entendus (ûicovoiai). On comprend qu'He- raclite ait déposé son livre, selon la tradition ^, dans le temple d*Éphèse, sous la protection de la déesse : ce n'é- tait nullement, quoi qu'on en puisse penser, une pro- fession de foi, au sens où la foule pouvait l'entendre.

Sa doctrine s'applique de même à l'étude de l'homme. Dans la nature humaine, il distingue nettement le corps et l'âme. Le corps par lui-même est sans valeur :

Il faut rejeter un cadavre avec plus de mépris que du fu- mier \

L'âme est un air sec et subtil ; plus elle est sèche, plus elle est intelligente ^. Dans l'ivresse, elle devient humide et perd sa vigueur '. Après la mort, les hommes doivent subir une destinée dont ils ne se doutent pas^ Laquelle? Il ost aisé de compléter la pensée d'Heraclite en se rap- pelant ce qu'il dit ailleurs. Les âmes les plus sèches et les plus ignées deviendront des dieux et des héros ; les âmes inférieures tomberont dans un état plus humide encore et plus matériel. D'où évidemment cette conclu- sion morale qu'il faut sécher et améliorer son âme.

Heraclite devait toucher aussi dans son livre à la vie de la cité, aux règles d'un bon gouvernement ; car, de son temps, la vie socialeprimaitlavieindividuelle, et la

1. Fragm. 34.

2. Diogéne Laërcc, IX, 6.

3. Fragm. 53.

4. AuTi 4/uxTi Œo^utaTTi (fragm. 72). Telle est la vraie forme de cette pensée, reproduite avec des altérations par divers auteurs.

5. Fragm. 70.

6. Fragm 63.

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