Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t2.djvu/595

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

VÉRACITÉ 583

qui a visité, comme il le dit lui-même, presque tous les pays décrits par Hérodote, peut se résumer ainsi : Héro- dote est un menteur ; les voyages qu'il prétend avoir faits sont en grande partie imaginaires; pour se donner Tapparence d'un témoin oculaire, il copie impudem- ment ses devanciers sans les citer, surtout Hécatée, à regard duquel il se conduit comme un rival de mauvaise foi et un plagiaire jaloux. Les arguments invoqués à Tappui de la thèse sont nombreux, mais peu solides. Soutenir qu'Hérodote, en dépit de ses affirmations, n'a pu aller à Éléphantine parce qu'il appelle Éléphantine une cité tandis que c'était une île^ c'est oublier, et bien lé- gèrement, qu'il y avait dans cette île une cité mention- née par Strabon et dont les restes sont encore visibles. Soutenir qu'il n'a pas vu la Haute-Egypte parce qu'il en aurait parlé plus longuement, c'est oublier qu'il n'a rien dit de la Phénicîe, où personne (pas même le nouveau critique), ne conteste qu'il soit allé. Soute- nir que, s'il avait été à Babylone, il n'aurait pas com- mis, dans la description de la route royale de Sardes à Suso, les fautes grossières que nous présentent sur ce point les manuscrits d'Hérodote, c'est oublier que ce passage des manucrits a subi des altérations qu'on peut prouver en quelque sorte matériellement. Opposer à une affirmation précise et vraisemblable d'Hérodote une af- firmation vague et peu probable d'Arrien, et triompher de cette contradiction, c'est user d'une méthode critique au moins imprudente*. S'indigner qu'Hérodote, lorsqu'il cite ses prédécesseurs, dise simplement « les Ioniens », au lieu de dire en toutes lettres « Hécatée », c'est oublier

i. J'ai développa ces différents points et quelques autres encore dans la Revue des Études grecques^ 1888, p. 154. On pourrait multi- plier ind(^finiment ce genre de critiques à propos de l'argumentation du savant anglais. Cf., dans le Muséon belge de 1888, divers articles du H. P. Delattre (Cyrus dans les monumenls assyriens ; — ^ Vexacli^ tude et la critique en histoire d*après un assyriologue).

�� �