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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/160

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148 CHAPITRE IV. — LA TRAGÉDIE ET SES LOIS

de la tragédie. Merveilleusement souples et variées, ces compositions pouvaient être très dramatiques, et elles le furent souvent. Mais c'était à condition que l'expression sincère du sentiment y prédominât. Leur inconvénient était de se prêter trop docilement à la virtuosité pure de Facteur et du musicien. La mimique et I9 musique y étaient sans cesse sollicitées à empiéter sur la poésie pro- prement dite. Les critiques d'Aristophane prouvent qu'à la fin du V* siècle ce genre d'empiétement n'était pas rare.

Nous sommes trop mal renseignés sur l'emploi des di- vers modes musicaux dans le lyrisme tragique pour qu'il soit possible d'en présenter un exposé satisfaisant. Quelques mots à ce sujet suffiront ici. Les deux modes par excellence du lyrisme tragique étaient le mode do- rien et le mode mixolydien, le premier grave et majes- tueux, le second pathétique K Indépendamment de ces modes fondamentaux, Eschyle employa par exception le mode ionien, plaintif et presquelangoureux, en vue de cer- tains effets particuliers ^. Sophocle, à son tour, intro- duisit au théâtre le mode phrygien, ardent et enthou- siaste ^ Si le lydien, réputé pour sa mollesse, y fut ad- mis également, ce que nous ignorons, ce ne peut être que de la même manière, c'est-à-dire par suite d'initiatives individuelles qui ne créèrent pas un usage. Quant aux modes éolien (ou hypodorien) et hypophrygien, Aristote atteste expressément qu'ils étaient étrangers aux chants du chœur, mais qu'ils convenaient à certains chants delà scène, le premier par son caractère de grandeur paisible, le second parce qu'il respirait l'ardeur de l'action *.

1. Plutarque, de Musica, 16.

2. Eschyle, Suppliantes, v. 69.

3. Vie de Sophocle.

4. Aristote, Problèmes, XIX, 48.

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