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DIALOGUE ET RÉCITS 149

VII

Après le chant, le second mode d'expression des senti- ments chez les poètes tragiques, c'est la parole simple, soit dans le dialogue, soit dans les récits.

On a coutume de dire que les scènes parlées représentent dans la tragédie l'élément épique. Gela n'estjuste que dans une certaine mesure. L'épopée grecque se composait de récits, de discours, d'entretiens. Or sans doute, dans la partie des tragédies qui était parlée, on retrouve aussi des récits, des discours et des entretiens. C'est une res- semblance incontestable, mais qui n'implique pas une filiation directe. Il est à remarquer d'abord que la partie lyrique de la tragédie contient aussi des éléments analo- gues, et que l'influence, au moins indirecte, de l'épopée, n'y est pas non plus insensible. La question est donc de savoir si cette influence s'est fait sentir plus directe- ment sur le dialogue proprement dit. Jamais la tragédie n'a emprunté, pour sa partie narrative et dialoguée, le mètre de l'épopée, l'hexamètre dactylique. Ce seul fait met hors de doute que, dès l'origine, bien des morceaux que nous jugeons plus ou moins épiques ne Tétaient pas pour les contemporains. Le mètre primitif des entretiens ou des monologues tragiques fut le tétramètre trochaï- que. Ce rythme vif, courant, satyrique n'avait rien de la gravité de Tépopée. Quand nous le retrouvons encore, ça et là, dans les pièces d'Eschyle ou dans celles d'Euripide, il sert à traduire des échanges rapides de paroles, ques- tions inquiètes et pressées, disputes, provocations. Issu de la poésie bachique, il en gardait le caractère. Évi- demment, quand les emprunts faits par la tragédie à la tradition épique se présentaient sous cette forme, c'é- tait tout autre chose que des morceaux d'épopée décou- pés et insérés entre des chœurs. En somme, la tragédie était une; et, si elle procédait de l'épopée, ce qui n'est

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