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156 CHAPITRE IV. — LA TRAGÉDIE ET SES LOIS

gique uo caractère entièrement dorien. Le poète attique fait son choix parmi ces formes, et ce choix est fort dis- cret. En réalité^ tout le dorisme de la tragédie, dans ses parties chantées, se réduit à peu près à la substitution de r a long au son attique de Tt). Cela donne à ces parties une teinte doricnne, mais rien de plus. Si d'ailleurs la tragédie n'emprunte que peu de formes au lyrisme do- rien, en revanche elle lui doit beaucoup quant au voca- bulaire et aux habitudes du langage. Dans les parties chantées, cette influence est évidente. Les mots compo- sés, les épithètes sonores, les accumulations d'adjectifs, les constructions hardies, les enlacements de phrase, en un mot presque tout ce qui en fait la beauté extérieure vient de la tradition dont Stésichore, Arion, Ibycos, Si- monide et Pindare étaient les représentants. Non que Toriginalité de i*esprit attique n'apparaisse jusque dans l'emploi de cette richesse. Elle y est manifeste au contraire ; mais elle ne crée point les ressources dont elle dispose; elle se contente de les approprier à son goût. Dans les parties non chantées, l'influence de la poésie dorienne est naturellement beaucoup plus faible. Pourtant, nous verrons plus loin que, au temps d'Es- chyle, elle a certainement contribué à la grandiloquence du dialogue tragique. Et comme la langue d'Eschyle, malgré les modifications que lui ont fait subir Sophocle et Euripide, est restée en somme le type même du lan- gage tragique, on ne peut nier que celui-ci n'ait profité des exemples et des traditions du lyrisme. Certaines qualités remarquables, la concision forte et hardie des expressions, surtout le goût des images éclatantes et des alliances de mots, paraissent lui être venues de là plu- tôt que de l'épopée.

Toutefois, après le lyrisme, l'épopée aussi a eu son influence profonde et constante sur le langage tragique. La poésie homérique constituait en Grèce une sorte de

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