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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/254

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Sophocle disait de lui-même, selon ce que rapporte Plutarque, qu’après avoir rejeté comme puéril le faste d’Eschyle, puis l’artifice exagéré de sa propre manière, il avait enfin adopté en troisième lieu le genre de style le plus naturel, qui était le meilleur[1]. Cela donne l’idée d’une attention constante du poète sur lui-même et d’un changement réfléchi, dont les pièces subsistantes rendent d’ailleurs témoignage. Il y a en effet moins d’effort apparent dans Philoctète et dans Œdipe à Colone que dans Antigone et dans Électre, non seulement pour le style, mais d’une manière générale pour le jeu des sentiments et pour l’arrangement des choses. Quant au faste d’Eschyle, Sophocle l’avait déjà rejeté à la date des plus anciennes pièces de lui qui nous soient restées.

Outre ses tragédies, il avait composé, d’après divers témoignages, des élégies, des péans, et un traité sur le chœur. Il ne nous reste de tout cela que des fragments insignifiants[2].

    ger, Ismène, Créon, Polynice, messager ; acteur supplémentaire, Thésée. — Si l’on rejette le quatrième acteur, il faut que le rôle de Thésée soit joué d’abord par le tritagoniste, dans le second épisode (549-667) ; puis, par le deutéragoniste dans le troisième épisode (886-1043) ; puis, de nouveau, par le tritagoniste dans le quatrième épisode (1120-1210) et dans le cinquième (1500-1555) ; enfin par le protagoniste dans la scène finale (1750-fin). Cela n’a rien d’improbable, à la réflexion, puisque le rôle de Thésée n’implique aucune passion, rien de personnel par conséquent, et que dès lors l’identité du personnage pouvait être suffisamment conservée par celle du masque et du costume. Des acteurs exercés savaient en pareil cas atténuer la diversité de leurs voix ; et l’écart des scènes empêchait que le public n’en fût choqué. Si Sophocle eût disposé d’un quatrième acteur, il semble qu’Ismène aurait dû être présente, comme Antigone, à la scène entre Œdipe et Polynice.

  1. Plutarque, Progrès dans la vertu, 7 : Ὁ Σοφοκλῆς ἔλεγε τὸν Αἰσχύλου διαπεπαιχὼς ὄγκον, εἶτα τὸ πικρὸν καὶ κατάτεχνον τῆς αὑτοῦ κατασκευῆς, τρίτον ἤδη τὸ τῆς λέξεως μεταβάλλειν εἶδος, ὅπερ ἐστὶν ἠθικώτατον καὶ βέλτιστον. Il n’y a d’obscur dans ce passage très controversé que le mot διαπεπαιχώς qui semble altéré. Le reste est clair et excellent.
  2. Suidas, Σοφοκλῆς ; Harpocration, Ἀρχὴ ἄνδρα δείκνυσι ; Héphestion, 8 ; Érotien, 390 ; Plutarque, S’il est bon qu’un vieillard, etc., 3.