Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/416

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

404 CHAPITRE IX.— LE DRAME SATYRIQUE

bien boire ^ D'ailleurs la ruse même dont il se sert, l'invention du faux nom de Personne, son emploi et ses conséquences, toutes ces inventions renouvelées de V Odyssée, tiennent du conte bien plus que de la tragé- die. Encore Ulysse est-il de sa nature un héros sage, mesuré, incapable d'aucune frasque ni incartade quel- conque. Mais le drame satyrique en a souvent admis ou recherché d'autres d'un caractère bien différent. Héraclès peut être choisi comme le type de ces personnages en qui des vices de satyre se mêlaient à des vertus de héros. Or c'est là précisément ce qui Ta rendu populaire et ce qui lui a valu la faveur très marquée des auteurs de drames satyriques. Il prit chez eux le nomf familier àHIérullos ^ ; cela indique qu'on ne se gênait pas avec lui. Sa gourmandise, sa brutalité^ son intempérance sensuelle étaient un sujet de rire pour le peuple, et ou se gardait bien de lui en refuser le plaisir. On sait sa con- duite dans VAlceste d'Euripide. Il arrive après la mort d'Alccste chez son hôte Admète ; il y est reçu en ami ; on lui dissimule la véritable cause du deuil qui remplit le palais; et lui, peu curieux, mais toujours affamé, s'empresse de se mettre à table. L'inconvenance de ses manières scandalise toute la maison, et voici en quels termes un vieux serviteur se plaint de lui :

« J'ai vu venir dans la maison d'Admète bien des étrangers de tout pays, et je leur ai servi à dîner. Mais jamais hôte plus odieux que celui-ci n'a été encore accueilli à ce foyer. Il a vu mon maître tout en larmes, et il est entré I Et il a osé fran- chir notre seuil I Puis a-t-il reçu discrètement ce que nous pouvions lui offrir, informé qu'il était de notre malheur ? Non : tout ce qu'on ne lui apportait pas, il l'exigeait aussitôt. Bien plus, prenant une coupe entourée de lierre, il boit le vin pur, précieux produit de la grappe noire, jusqu'à ce que la flamme

\. Cyclope, V. 519 et suivants. 11 faut, pour en bien juger, relire la scène en son entier. 2. Eustalhe, ad Iliad. 2, p. 987, 47 : *HpuX>oç èv toïç aarvptxoîc*

�� �