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TRANSFORMATION DU DITHYRAMBE 36

gendes de héros. A mesure que celles-ci entrèrent plus largement dans les fêtes de Bacchus, comme équivalent de celles-là, les satyres durent être plus souvent rem- placés par des chœurs non satyriques. Ces derniers représentaient le cortège naturel des héros, leurs com- pagnons, leurs soldats, leurs serviteurs, comme les satyres eux-mêmes personnifiaient dans les légendes de Bacchus les suivants du dieu. Il y eut alors deux sortes de chœurs tragiques, de caractères assez différents K Mais comme, au fond, l'esprit grec était très conserva- teur dans les choses religieuses, il est peu probable qu'on se soit décidé à éliminer complètement le chœur satyrique des représentations où figurait un chœur héroï- que. Si la chose fut tentée, elle dut déplaire au public et rinquiéter. Il n'y avait pas à dire : c'était dépouiller Bacchus d'un genre d'hommages auquel il était habitué. On ne savait pas comment il prendrait cela. Le chœur satyrique lui était cher, parce qu'il était proprement à lui. La prudence commandait à une cité croyante de le maintenir à côté du nouveau chœur dont on lui offrait le spectacle ^. Voilà sans doute comment, dans les tragédies dont les héros étaient le sujet, on fut amené à réserver aux satyres un acte, prologue ou exode, qui devint le germe du drame satyrique proprement dit ^ En leur

1. On remarquera que, dans le passage de VEtymolog, Magnum cité plus haut (p. 30, n. 1), il est dit : -rà TcoXXà ol x^po^ èx o-atupwv au- vto-xavTo. On peut inférer des mots Ta otoXXà que cela n'avait pas lieu toujours.

2. Le proverbe Ovôèv atpbç t'ov Aiovuaov a sa légende bien connue. On dit qu'il fut d'abord la formule spontanée d'une vive réclamation du peuple, indigné de voir qu'on frustrait le dieu de ses satyres. Quelle que soit la valeur de cette historiette, elle traduit du moins un genre de scrupule fort naturel, qui dut alors exercer une influence capitale sur le développement du genre tragique.

3. Aristote, Poétique, c. 5 : Aià to èx o-aTUpixoO jteTaêaXeïv, ô<j/é àîce- (rE(xvuv6Y]. Il résulte certainement de ce témoignage, en particulier du mot ô^/é, que la tragédie fut longtemps associée à l'élément satyrique.

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