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PRÉDÉCESSEURS D'ARISTOPHANE 469

matique d'une idée. Des ébauches de comédies surgis- saient en foule de son imagination puissante, toutes vi- ves, riches et plaisantes ; il savait tourner et retourner un même sujet en mille manières ingénieuses et for- tes *. Créateur, il Tétait d*instinct et sans cesse, comme Eschyle, auquel on a pu le comparer^. Un jour, il met- tait en scène tout un chœur d'Archiloques, déchaînant ainsi contre les vices contemporains une véritable meute de critiques acharnés ; une autre fois, il évoquait le vieux législateur Selon, qui venait, approuvé par un chœur de Ghirons, censurer ses compatriotes. De telles conceptions étaient des trouvailles dramatiques. Pour en tirer parti, le poète n'avait qu*à se laisser aller à Tessor spontané de son génie. Sa fougue et une sorte de grandeur naturelle le faisaient comparer aux auteurs de dithyrambes; Aristo- phane l'appelait comme eux « un mangeur de taureaux^ »; il leur ressemblait par l'élan, par l'audace, dans les sen- timents et sans doule aussi dans le style. Le lyrisme lui était naturel ; quelques-uns de ses chants étaient dans toutes les bouches *. S'il eût été tout à fait maître de lui- même, la comédie ancienne entre ses mains aurait at- teint la perfection. Mais sa fougue Tégarait. Il avait trop d'idées et pas assez d'art pour mener une action : « A me- sure qu'il va, dit le critique ancien déjà cité, il tire en tous sens et déchire lui-même son plan, et il ne sait pas remplir un drame conformément à ce qu'il annonce d'a- bordé » Dans ces conditions, ses pièces devaient être des ébauches puissantes plutôt que des œuvres achevées.

Il s'en faut de beaucoup que les titres et les fragments de ses comédies nous permettent toujours d'en deviner

1. Didot, Schol, gr. in Arist., Proleg. II : IIoXÙç hï xai xaïç rpoiraïc Toy^avei* euoro^/oç Se... èv raïç èuiêoXaîç twv 8pa(i.aT(i)v xa\ 6ia<Txeuaïç.

2. Ihîd., Proleg. III : Katao-xeyaCwv el; xbv Aîo-^uXoy xapaxxripa.

3. Grenouilles^ 343 : Kpaxtvou xoO xaupoçà^oy.

4. Aristoph., Chevaliers, pass. cité.

5. Didot, Sch. gr. in A7Hst., Proleg. II.

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