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DION DE PRUSE ; DISCOURS MORAUX

et il s’adresse à un auditoire familier. Cela donne à sa parole une grâce plus naïve, qui plaît et qui attache.

Mais ce qui a fait la renommée de Dion, ce sont incontestablement les discours ou écrits de prédication morale, qui forment le troisième groupe[1]. Tous appartiennent à la dernière partie de sa vie, c’est-à-dire au règne de Trajan ; et ils relèvent tous d’une même pensée, celle d’une sorte de mission, pour l’accomplissement de laquelle Dion a voulu mettre les ressources et les habitudes de la sophistique contemporaine au service de la philosophie pratique[2].

Ce qu’il prêche n’a rien en soi d’original. Il emprunte ses idées au syncrétisme philosophique du temps. Sa morale est principalement stoïcienne[3], mais non exclusivement ; elle a subi l’influence manifeste de l’Académie, du Lycée, et des Pythagoriciens. Sa théologie est plutôt platonicienne, mais elle l’est sans parti pris ; elle fait aussi des emprunts aux doctrines pythagoriciennes et à la mythologie populaire. C’est qu’au fond, Dion n’est pas un philosophe à proprement parler, c’est-à-dire un homme qui se soucie de se former un ensemble d’idées liées sur les vérités essentielles[4]. C’est tout simplement

  1. Citons les principaux. Ce sont les nos 1, 2, 3, 4 (Περὶ βασιλείας), 5 (Λιβυκὸς μῦθος), 6 (Περὶ τυραννίδος), 7 (Εὐβοϊκός), 12 (Ὀλυμπικός), 13 (Περὶ φυγῆς), 32 (Πρὸς Ἀλεξανδρεῖς), 33 (Ταρσικὸς πρῶτος), 35 (Ἐν Κελαίναις τῆς Φρυγίας), 36 (Βορυσθενιτικός), 80 (Τῶν ἐν Κιλικίᾳ περὶ ἐλευθερίας). Il faut y ajouter un certain nombre de morceaux qui figurent dans le recueil sous des titres généraux (Περὶ δουλείας, Περὶ λύπης, etc.), et qui semblent extraits de discours analogues, aujourd’hui perdus.
  2. Voir sur la prédication de Dion le chapitre de C. Martha intitulé : La prédication morale populaire, dans ses Moralistes sous l’Empire romain, ouv. cité plus haut. — Pour l’appréciation de Dion, consulter E. Weber, De Dione Chrysostomo. Leipziger Studien, X, 1887 et H. von Arnim, ouv. cité, ch. v.
  3. Synesios, Dio : Ὁ δ’ οὖν Δίων ἔοικε… ὄνασθαι τῆς στοᾶς ὅσα εἰς ἧθος τείνει.
  4. Synesios, même pass. : Ἔοικε θεωρήμασι μὲν τεχνικοῖς ἐν φιλοσοφιᾳ μὴ προσταλαιπωρῆσαι μηδὲ προσανασχεῖν φυσικοῖς δόγμασιν.