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JULIEN

plaisir, de mollesse, adversaire des philosophes, oublieux de l’hellénisme ; et Julien, en faisant sembler de vanter ses qualités, le persifle en réalité amèrement, pour ses mœurs efféminées, ses engouements puérils, sa facilité aux nouveautés trompeuses. Il y a beaucoup d’esprit dans ce persiflage, mais un esprit un peu dur, qui manque parfois de bon goût, et qui n’est pas exempt d’une sorte de pédantisme hautain. Entre les meilleurs passages, il faut citer celui où Julien oppose à l’Orient amolli la rudesse naïve des Celtes, au milieu desquels il venait de passer six ans, et rappelle, non sans charme, le souvenir de Lutèce. L’ouvrage, dans son ensemble, est d’ailleurs fort curieux par les détails piquants qu’il nous donne sur la population d’Antioche.

La courte composition, à demi-dramatique, intitulée Le Banquet, les Saturnales, ou les Césars (Συμπόσιον ἢ Κρόνια ἢ Καίσαρες), est loin d’avoir la même valeur. C’est un jeu d’esprit, artificiel comme un exercice scolaire. Dans un banquet imaginaire donné aux Olympiens par Cronos, les Césars divinisés viennent s’attabler ; Alexandre se joint à eux ; Silène, qui est le comique de l’Olympe, juge chacun des convives en quelques mots. À la fin, un concours de mérite est ouvert entre les meilleurs : César, Alexandre, Auguste, Trajan, Marc Aurèle et Constantin y prennent part. C’est Marc Aurèle qui obtient le plus de suffrages. Aucun, sauf lui, n’échappe aux épigrammes de Silène ; mais le plus maltraité est Constantin, moins encore pour ses crimes et sa mollesse que pour avoir protégé le christianisme. La satire a donc une tendance à la fois morale, politique et religieuse ; mais elle n’est ni assez approfondie ni assez piquante.

Cet ensemble d’écrits est complété par une correspondance étendue. Nous possédons soixante-dix-huit lettres attribuées à Julien, parmi lesquelles figurent,