Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/932

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
914
CHAP. VII. — L’ORIENT GREC AU IVe SIÈCLE

tion. Si nous sommes heureux de rencontrer dans son livre quantité de pages qui auraient péri sans lui, nous sommes, en revanche, confondus de voir avec quelle confiance il accepte les témoignages les plus suspects. Une œuvre ainsi faite ne peut pas être appelée une grande œuvre. Par ses défauts évidents, elle se rattache encore à la tradition confuse des apologistes antérieurs ; mais elle les dépasse par l’ampleur des vues et par une certaine compréhension des choses, plus large et plus sereine, qui n’était possible qu’une fois la victoire assurée, quand l’hellénisme commençait à descendre dans le passé.

VIII

Avec Eusèbe, nous ne sommes encore qu’au seuil du ive siècle chrétien, et les traits qui vont caractériser la littérature chrétienne de ce temps n’apparaissent en lui qu’obscurément. Ce furent les grands débats relatifs à l’arianisme qui commencèrent à les dégager autour de lui, chez des écrivains ou des orateurs plus ardemment mêlés qu’il ne l’était aux luttes quotidiennes[1].

Aucune des hérésies antérieures ne saurait être comparée à l’Arianisme pour l’importance historique : aucune n’avait ébranlé le monde chrétien comme il l’ébranla. Cela tint en partie à des causes politiques, telle que l’organisation de la société ecclésiastique en ce temps, le rôle grandissant des évêques et des conciles, l’extension de la vie monastique, surtout l’intervention des empereurs, qui, devenus chrétiens, prétendaient gouverner le christianisme. Mais cela tint aussi à la nature même de la question soulevée. Le gnosticisme du iie et du iiie siècle, sous ses diverses formes, s’était

  1. Rappelons ici l’ouvrage connu de Villemain (Tableau de l’Éloq. chrétienne au ive siècle, Paris, 1850), exposé brillant, mais superficiel, qui ne peut donner qu’une vue très incomplète du sujet traité.