Page:Cultru - Un empereur de Madagascar au XVIIIe siècle - Benyowszky.djvu/43

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cette entreprise, il repassa en France sur l’escadre de La Bourdonnais, en 1747, et présenta son projet au commissaire du roi près de la Compagnie, M. Rouillé qui l’engagea à l’exécuter lui-même. Poivre repartit donc au mois d’octobre 1748. Il devait se rendre en Cochinchine pour y établir une factorerie française à Taifao ; de là il irait à Manille et en rapporterait des plants d’arbres à épices pour l’île de France. On lui promettait, en cas de réussite, une gratification de 30,000 livres et une pension de 1,200 livres. Il ne paraît pas qu’il soit allé en Cochinchine, car, d’après ses lettres aux directeurs de la Compagnie, il était à Manille en 1749 commerçant pour son compte : il tâchait de se procurer des plants, envoyait dans l’archipel de petites embarcations qui, sous prétexte de faire la course, devaient lui procurer ce qu’il cherchait ; mais le secret de sa mission avait été divulgué ; les Espagnols y mirent obstacle, et, quand il revint à l’île de France, en 1753, il ne rapportait que 5 petits muscadiers en bon état sur 32 qu’il avait pu soustraire. Il repartit l’année suivante, séjourna encore plusieurs mois à Manille, à Timor et dans d’autres îles ; il en rapporta des noix de muscadiers et des baies de girofliers ; or le sieur Aublet, apothicaire et botaniste à Port-Louis, déclara que c’étaient des plants tout différents, de simples noix d’arec. Poivre manifesta la plus violente indignation contre cet audacieux contradicteur ; mais celui-ci, loin de se dédire, osa prétendre que les noix présentées par le voyageur comme étant en pleine germination avaient été tirées de confitures de muscades. Il soutint qu’une muscade, plantée soigneusement tout au fond d’un bac, ayant été examinée, s’était trouvée n’être qu’un caillou ; que dans un autre bac, une racine pivotante, qui paraissait sortir d’une noix, était ingénieusement piquée dedans ; que, dans un troisième, on avait bien trouvé une muscade, mais coupée en deux : les deux moitiés entouraient un plant très vivant, mais tout à fait étranger au fruit. Tous les plants apportés cette année-là, légitimes ou non, périrent et